Il y a des moments touchés par la grâce. Ces petits moments qui, on ne sait pour quelle raison, resteront à jamais gravés dans l’esprit. Où le timing est parfait, où il ne fait ni trop chaud, ni trop froid. Où rien ne vient perturber ce petit moment d’éternité pendant quelques secondes trop parfaites. J’ai eu un de ces moments uniques dans le temple de Preah Khan au Cambodge. J’aurais voulu que cela dure toujours, mais peut-être que c’est pour ça que c’est si parfait dans ma tête. Parce que c’était éphémère…
A la découverte de Preah Khan au Cambodge
Je viens d’arpenter le grand circuit qui permet de traverser sur plus de 12 kilomètres différents temples d’Angkor. La chaleur est un peu tombée (même si c’est encore étouffant). Le gros des touristes est parti, ce qui laisse une agréable sensation de calme et de plénitude dans les temples.
Preah Khan se trouve à seulement quelques kilomètres du temple d’Angkor Wat, mais il a l’avantage de ne pas être trop prisé des touristes, malgré sa grande taille et sa richesse en termes de sculptures. Peut-être un peu trop endommagé pour intéresser les touristes en mal de photos de frises impeccables. La nature a largement envahi la plupart des cours intérieures de ce temple grandiose. Justement, c’est ce que je préfère : quand c’est bien dans son jus !
La nature y est omniprésente, par les arbres juchés sur les murailles, l’herbe qui pousse entre les dalles et les racines qui s’entrelacent dans les sculptures murales. Beaucoup de pierres tombées viennent joncher le sol. Depuis presque mille ans, la nature reprend ses droits, doucement, mais sûrement.
C’est la fin de la journée…
Je sors d’un labyrinthe de couloirs et de petits escaliers et arrive dans une des nombreuses cours intérieures de Preah Khan.
Le soleil se couche sur les temples. La lumière est rougeâtre, laissant un filtre imperceptible adoucir les couleurs des derniers rayons du soleil sur les murs. Il n’y a pas de brise, et pourtant, les feuilles des arbres tombent dans une danse légère et tourbillonnante avant de finir sur le sol. Un arbre blanc géant dégouline lentement sur un pan de mur au bord de l’écroulement. Je n’entends même plus le bruit des derniers visiteurs. Le temps est comme suspendu.
Je suis littéralement transportée dans une carte postale vivante. Hors du temps et hors des âges. Une carte postale où la main de l’homme et la nature cohabite pour une fois en parfaite symbiose. Une carte postale où je ne me sens pas spectatrice mais actrice, petite part infime de ce grand tout auquel je ne comprends rien. En harmonie, juste là, au milieu de ce temple millénaire, dans cet instant magique et suspendu.
Un moment où la vie devient comme une poésie, douce grâce à un équilibre parfait entre les éléments, intense par les sentiments de paix et de sérénité qu’elle fait traverser dans un même moment très furtif.
C’est intense, c’est serein et c’est court…. beaucoup trop court.
Il est déjà temps d’aller voir le coucher du soleil sur la vallée des temples d’Angkor. Et je pars en me demandant qui a pu marcher là où je marche actuellement. Un haut fonctionnaire de la cours ? Une danseuse d’Apsara ? Un moine ? Et que sais-je d’autre encore.
Et à quoi ressemblera ce temple dans cent ans, détruit chaque jour un peu plus par son flot de touristes mal géré ? Aucune idée. Mais je sais que j’ai pendant un instant touché du doigt ce que Paulo Coelho aurait nommé « l’âme du monde ».
Tomber amoureuse de Preah Khan au Cambodge et entrouvrir la porte de l’âme du monde : CHECK !